Dawa Salfati ou la force tranquille

La liberté des femmes est au coeur de son nouveau album : "Tabou"

Spectacles, musiques & festivals
Non classéSélection
Par Champs Libres Média – Florence Bobillon
3 minutes de découverte
05 • 12 • 2023
Les six titres de son dernier EP Tabou racontent l’intimité des femmes d’aujourd’hui… sans tabou. Justement. De sa voix douce et mélancolique, la musicienne et chanteuse Dawa Salfati, installée quelque part dans la campagne en dordogne, explore les sentiments du polyamour, de la rupture amoureuse, de la naissance d’un enfant, des menstruations. Le rythme chaloupé, les textes forts et contemporains font de cet album une ôde à la liberté des femmes à disposer de leurs corps et de leur vie. Sensuel.

La musique, elle connaît. Dawa Salfati la pratique depuis ses dix sept ans au sein de groupes avec qui elle a essaimé les rues et les scènes du monde. Ua Tea, Femmes Squelette,… Depuis près de quinze ans, l’artiste collabore dans des formations singulières depuis la Dordogne où elle réside. Il lui aura donc fallu quelques années et la naissance de sa fille pour oser se lancer seule dans cette aventure musicale qu’est Tabou. Et c’est une réussite. Les textes racontent des moments de la vie d’une femme avec justesse et franchise. Et une belle dose de liberté !

La liberté sans tabou

Assurément, les origines îliennes de Dawa Salfati s’entendent dans sa musique. La langueur et le léger roulis sont sans doute une réminiscence de son enfance, qu’elle a passée à Tahiti. Si elle raconte “en caresse”, c’est parce que “le monde semble avoir besoin de douceur”. Mais ne nous y trompons pas, les textes forts font échos aux combats actuels des femmes pour se libérer des rôles contraints auxquels les réduit la société patriarcale. 

Je voulais exprimer en l'écrivant une rage profonde de devoir se cacher en tant que femme; être pure, vierge, blanche, et j'en passe…

La chanson “Laisse le sang” qui est au coeur de cet album, est emblématique en ce qu’elle affirme haut et fort ce que l’on s’acharne à cacher depuis des siècles. Dire le corps pour s’affirmer. “Pour l’anecdote, j’ai commencé à écrire ce texte en tournant autour du mot « menstruation », et j’écrivais en boucle « je suis un menstre ». C’est une image qui m’apparait claire sur comment le patriarcat à décider de nommer le sang des femmes, un monstre sanguinolent à ne pas approcher.”

Dawa Salfati va plus loin en s’octroyant avec audace une liberté amoureuse rarement évoquée. Aimer deux hommes en même temps. La chanteuse s’est sans doute laissée prendre dans les fils de cette toile complexe. Elle a cru y trouver sa solution de l’amour jusqu’au jour d’après où le sentiment de liberté s’efface devant l’amertume d’avoir fait souffrir l’un et voulu plaire à l’autre. Que la déconvenue amoureuse soit une rupture ou un déséquilibre, les sentiments les plus pertubants sont toujours observés avec une sorte d’acceptation. Dawa Salfati nous le dit, à sa manière : les choses passent, s’effacent, se transforment.

Je comprends avec le temps qu'il existe plusieurs modèles de relations amoureuses possibles. L'important est de choisir pour soi, le modèle, relation peut importe comment on souhaite le nommer, qui nous fait du bien. Le reste n'est que chimères.”

Une ôde à la femme

La chanteuse poursuit sa quête de renouer avec son corps dans Le nid, une chanson sur son accouchement à domicile. Un moment qu’elle décrit comme unique et où elle s’est sentie “mammifère, oiseau et sauvage”. Le féminin devient  sacré. “C’était terrible pour moi d’imaginer des personnes que je ne connaissais pas venir me toucher le corps, me toucher à l’intérieur, m’imposer des positions de corps, m’imposer des lumières criardes, m’imposer leurs regards et leur stress de timing d’aller toujours plus vite, me retirer le placenta et le jeter à la poubelle – bref c’était impensable pour moi de vivre cela.”

Une expérience humaine, en tout point. Un peu comme la série de photographies qu’elle a réalisée il y a quelques années, Sudoripare. Elle y faisait plonger ses modèles en apnée dans des eaux troubles en les invitant à se laisser bercer par leur imaginaire. Il en résultait des portraits aux allures de chimères, des apparitions oniriques et sensuelles. 

Que ce soit par ses photographies ou sa musique, à chaque fois Dawa Salfati réussit à immerger le spectateur dans un voyage sensoriel lumineux.

Vous pouvez la soutenir en achetant son EP Tabou sur la plateforme participative Ulule.

musiqueMusique actuelle et chansonruralité
Dordogne (24)

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